
Le Centre pour l’étude de la citoyenneté démocratique (CECD), basé à l’Université de Montréal, vient de m’accorder une Bourse de recherche pour les étudiants et les stagiaires postdoctoraux afin de financer la réalisation d’un nouveau projet de recherche portant sur le microciblage. Intitulé « Microciblage en ligne et hors ligne : un examen de la portée », ce projet prévoit une analyse de portée (scoping review) de la littérature portant sur le microciblage à des fins politiques et électorales.
Les données sont devenues centrales au sein des organisations électorales, représentant la « ressource première » de l’élaboration et du déploiement des campagnes. Combinées aux technologies numériques, elles permettent le microciblage, compris ici comme l’utilisation des données afin d’élaborer et de transmettre des efforts de communication à des segments de l’électorat ciblés et restreints, profilés en fonction de caractéristiques précises. Pour plusieurs, cela représente un point tournant sur le plan des stratégies électorales. Cela permet une communication non seulement personnalisée, mais individualisée, et ce autant sur le plan du message que dans la manière de le transmettre. Loin de se restreindre à la sphère électorale, le microciblage peut aussi être utilisé à des fins de communication gouvernementale, par des organismes et des organisations sans but lucratif, des syndicats, des groupes d’intérêt, etc.
Une étude de portée est une méthode systématique servant à établir l’étendue de la recherche sur un sujet donné (voir Peters et al., 2015). Elle permet aussi d’identifier les lacunes et les écarts à combler dans l’état du savoir. C’est à l’occasion de mon examen synthèse dans le cadre du programme de doctorat en science politique et de projets de recherche précédents que j’ai compris la nécessité et la pertinence de réaliser cet exercice. En effet, en dépit du nombre grandissant de publications portant sur le microciblage – particulièrement depuis le scandale Cambridge Analytica en 2018 – des lacunes semblent persister. Par exemple, en plus du manque de définition généralisée, les effets mesurables et les risques pour la démocratie, souvent mentionnés dans les écrits, demeurent peu étudiés empiriquement. Qui plus est, on remarque que le microciblage hors ligne est absent des considérations des auteurs. Seule une étude de portée nous permettra de confirmer ces constats et de cartographier les « zones grises ». Il est prévu de présenter les résultats de l’étude sous forme d’un article scientifique dont la soumission est prévue d’ici l’été 2021.
Ce projet s’inscrit dans le programme de recherche du CECD, particulièrement en ce qui concerne l’Axe 2 – Pratiquer la citoyenneté dans un monde de scepticisme. En effet, la perception du monde politique étant influencée par les transformations médiatiques, il ne fait nul doute que le microciblage a le potentiel d’avoir des conséquences sur la circulation de l’information politique (nous avons notamment abordé le sujet dans Dubois, Giasson et Montigny, 2020). À un époque où les enjeux sociaux et politiques sont caractérisés par la complexité et l’incertitude, la qualité du débat démocratique dépend de la qualité de l’information. C’est une condition sine qua non de la citoyenneté démocratique.
L’échéancier prévoit la réalisation du projet de mars à juillet 2021.
À propos du CECD:
Le CÉCD rassemble des chercheurs et des professeurs provenant de six universités québécoises qui mènent des études liées la citoyenneté démocratique. Ces universités sont l’Université Concordia, l’Université McGill, l’Université Laval, l’Université de Montréal (UdeM), l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et la Téluq. L’objectif du Centre est de développer des perspectives interdisciplinaires en utilisant différentes méthodes de recherche afin d’étudier les enjeux auxquels les démocraties font face dans un monde en constante évolution.
Plus de détails sur la mission et les travaux du CECD sur le site web.
Envie d’en savoir plus? Écrivez-moi!
Sur le même thème:
- Potential Impact of Social Media and Data-Driven Campaigning on Democracy: A Perspective from Québec (avec Thierry Giasson et Eric Montigny), Inquiry into the Impact of Social Media on Elections and Electoral Administration, 2020
- On the edge of glory (…or catastrophe): regulation, transparency and party democracy in data-driven campaigning in Québec (avec Eric Montigny et Thierry Giasson), Internet Policy Review, 2019
- Recension: « Big data électoral: dis-moi qui tu es, je te dirai pour qui voter » d’Anaïs Theviot (Le bord de l’eau, 2019), Revue canadienne de science politique, 2020
[…] Microciblage en ligne et hors ligne : un examen de la portée, projet de recherche financé par le Centre pour l’étude de la citoyenneté démocratique, 2021 […]
J’aimeJ’aime