
C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai collaboré à l’ouvrage Rhétoriques, métaphores et technologies numériques. L’influence du langage sur notre perception de la numérisation du monde sous la direction des professeures Emmanuelle Caccamo (Université du Québec à Trois-Rivières) et Maude Bonenfant (Université du Québec à Montréal).
J’y signe un chapitre intitulé « De Big Deal à Big Brother – L’évolution des cadres médiatiques sur l’usage des renseignements personnels en politique québécoise ». J’y présente les résultats d’une analyse de contenu qualitative de la couverture par la presse écrite québécoise de l’utilisation des données personnelles à des fins partisanes.
Principales contributions:
- Permet d’identifier une évolution en deux temps dans la couverture médiatique. Une première période (2013-2017) est marquée par un cadrage favorable à l’utilisation des renseignements sur l’électorat à des fins stratégiques, alors que la seconde (2018-2020) est caractérisée par une augmentation du traitement du sujet et un ton plus négatif. C’est donc un passage du Big Deal! à Big Brother dans la foulée du scandale Facebook-Cambridge Analytica.
- Montre que lorsque les médias écrits québécois interrogent le recours aux données en politique, c’est principalement sous l’angle de la protection de la vie privée. L’enjeu est généralement présenté comme une question politique dont la réponse doit être législative. Très peu d’articles publiés dans les journaux traitent des autres angles du sujet, comme les conséquences démocratiques du marketing politique ou du micro-ciblage électoral.
- Met en évidence une inégalité entre les types de sources citées par les journalistes: si les politicien.ne.s et leurs équipes électorales ainsi qu’Élections Québec sont bien présents dans la couverture médiatique, le secteur privé, le milieu universitaire et la société civile ne sont que peu (voire très peu) sollicités.
- En étudiant des cadres médiatiques, le chapitre permet plus généralement de mieux comprendre le processus par lequel se construisent les imaginaires collectifs et sociotechniques quant au rôle des technologies et du numérique en politique québécoise. Il s’agit pour le moment de l’une des rares contributions francophones (et en contexte francophone) sur le sujet.
Extrait:
L’analyse qualitative des articles des quotidiens les plus lus permet de cerner une évolution du cadrage en deux temps. D’abord, une première période (de 2013 à 2017) se caractérise par un cadre plus favorable à l’égard de l’utilisation de renseignements personnels sur les électeurs à des fins stratégiques. Celle-ci est présentée comme une solution légitime aux défis avec lesquels doivent composer les formations politiques en contexte de baisse du militantisme et de transformations technologiques. La seconde période (de 2018 à 2020), marquée par le dévoilement du scandale Cambridge Analytica coïncidant avec une élection générale au Québec, amène une augmentation de la saillance du sujet et une évolution du cadre. Le recours par les politiciens aux technologies numériques pour la collecte et le traitement d’information sur l’électorat est alors présenté comme un problème auquel il faut trouver une solution afin de mieux protéger la vie privée des citoyens. Cette solution semble passer par la voie législative, de concert avec les recommandations officielles du DGEQ qui bénéficie d’une position de premier plan – tout juste derrière les acteurs de la sphère politique – comme source privilégiée par les journalistes.
Le chapitre est disponible:
- Sur le site des Presses de l’Université du Québec (PUQ) [version payante]
- En version postprint, c’est-à-dire le manuscrit accepté mais non édité [en libre accès]
N’hésitez pas à me contacter par courriel pour toute question ou commentaire!
Pour citer cette publication: Dubois, Philippe R. 2022. « De Big Deal à Big Brother. L’évolution des cadres médiatiques sur l’usage des renseignements personnels en politique québécoise », dans Emmanuelle Caccamo et Maude Bonenfant (dir.), Rhétoriques, métaphores et technologies numériques. L’influence du langage sur notre perception de la numérisation du monde, Québec, Presses de l’Université du Québec, p. 137-161. |
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